
Il y a 80 ans, fidèle au programme du Comité National de la Résistance, le 4 et le 19 octobre 1945, Ambroise Croizat ministre communiste, mettait en place un régime général de couverture sociale comprenant les allocations familiales, l’assurance-maladie, les retraites et la couverture des accidents du travail. Géré par les travailleurs eux-mêmes jusqu’en 1967, le système ne dépendait ni de l’État ni du patronat. Depuis 1970 la classe bourgeoise mena un combat idéologique pour faire oublier cette avancée sociale. Depuis 40 ans les gouvernements libéraux qui se sont succédé l’ont déconstruite méthodiquement, avec acharnement.
Le premier ministre Bérégovoy fut le premier à mettre la main à la pâte en fermant 30.000 lits d’hospitalisation publique. Ce furent les prémices de la crise de l’hôpital. Le numérus clausus deviendra un outil de réduction des dépenses par la diminution du nombre de soignants formés : médecins, infirmiers, dentistes, etc.
Juppé chef du gouvernement, continua l’oeuvre de sape en s’attaquant aux régimes spéciaux. Le point fort fut la mise sous tutelle par l’État de la Sécurité sociale et il fit voter par le Parlement la loi de financement de la Sécu. C’était la fin d’une gestion ouvrière indépendante. Il n’en resta pas là, avec la réforme de l’hôpital. Nous supportons toujours les effets pervers de la création des Agence régionales d’hospitalisation, de la coopération « public/privé », de la maîtrise comptable des dépenses de santé, la logique comptable et financière se substituant aux besoins. Son plan fut la matrice de la contre-réforme libérale qui sera développée par la suite. Le ministre de la santé Douste-Blazy, prolongera la casse avec la nouvelle gouvernance de l’Assurance maladie, fit entrer les assurances privées au coeur de la gestion de la sécu. Bachelot aux manettes de la santé publique finira la basse besogne en mettant en place les outils de la privatisation.
Le check-up est consternant. Le personnel hospitalier est au bout du rouleau, les Français renoncent à des soins par manque de structures de proximité, il y a pénurie de médecins, il est difficile d’obtenir un rendez-vous en zone rurale comme en zone urbaine, le transfert public/privé s’opère, les complémentaires santé sont en expansion, les dépassements d’honoraires vont bon train. Le détricotage planifié est sur les rails. La droite a choisi la logique financière, Ambroise Croizat voulait répondre aux besoins humains. À chacun ses valeurs, la logique est respectée.
Louis Michel
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