Aube - Déserts médicaux
Depuis la crise sanitaire de la pandémie de Covid-19 il y a 5 ans, les téléconsultations pullulent. Il y en a en effet deux sortes, les médecins qui consultent en téléconsultations via leurs propres moyens de télécommunications ou via des plateformes médicales. Ce dispositif est normalement encadré notamment au niveau des coûts, puis il y a ensuite la cabine de téléconsultation. Ces dispositifs sont censés lutter contre les déserts médicaux. La Dépêche de l’Aube a mené son enquête.
Des dispositifs coûteux et inefficaces
L’idée de base de ces différents dispositifs était de permettre un meilleur accès aux soins pour les personnes en étant privées, comme par exemple celles qui vivent en désert médical ou encore celles ayant des pathologies lourdes engendrant des difficultés de déplacement. Or, force est de constater que ce n’est pas du tout ce type de public qui fréquente les cabines de téléconsultation.
Fin 2023, la CPAM d’Ile-de-France a sorti une étude qui montre notamment que les téléconsultations « plateforme » ont été pratiquées à 82 % au bénéfice de patients de 16 à 39 ans, quand celles effectuées par les médecins libéraux ne les concernent qu’à 51 %.
De plus, 90 % de ces consultations de plateforme le sont pour des patients n’ayant pas d’affection longue durée. En résumé, les utilisateurs sont urbains, jeunes, cadres et cadres supérieurs, et pas vraiment malades.
Par ailleurs, de nombreux médecins ont alerté sur les dérives qu’engendre ce type de dispositif : le patient est livré à lui-même devant un écran et avec accès à des outils médicaux : un thermomètre, un stéthoscope, un dermatoscope… Par ailleurs, le temps moyen de consultation est de 4 minutes…
Beaucoup de médecins crient au scandale en précisant qu’une consultation est impossible en si peu de temps, de plus comme les médecins du dispositif ne connaissent pas le patient, les prescriptions d’antibiotiques augmentent : ne pouvant effectuer un véritable examen clinique, ils jouent la carte de la sécurité et prescrivent 2,5 fois plus d’antibiotiques que les généralistes en cabinet.
Et enfin, 20% des consultations sont suivies par une « vraie » consultation en physique la semaine qui suit. Ce qui démultiplie les remboursements de la Sécurité sociale.
Les déserts médicaux perdurent
Dans notre département, la téléconsultation correspond à 13000 consultations en 2024, 1000 de moins qu’en 2023. Cela représente 1,6% des consultations totales contre 2,7% dans toute la région Grand Est. En gros, les aubois vivent dans un désert médical mais utilisent moins qu’ailleurs ce type de dispositif pourtant conçu pour eux !
On marche sur la tête et cela prouve encore que ce n’est pas la solution au problème d’accès aux soins.
Dans l’Aube 68 médecins ont pratiqué au moins une fois la téléconsultation l’année passée, puis nous voyons fleurir des cabines dans des pharmacies ou même… dans des centres commerciaux ! Comme c’est le cas à Monoprix à Troyes.
Libéralisation de la médecine
L’autre problème étant que ces cabines appartiennent à de grands groupes qui s’en servent pour faire du profit. C’est le cas de Meladom et Tessan.
Malheureusement il n’y a que trop peu de régulations concernant l’installation de ces cabines qui deviennent une activité lucrative. Les consultations de nuit ou de week-end étaient il y a encore quelques mois facturées 60 euros. C’est désormais interdit depuis le 1er janvier, les consultations sont désormais limitées à 35 euros.
La prise en charge de ces dispositifs par la Sécurité sociale pose question puisqu’ils enrichissent les prédateurs de la santé. Il est nécessaire d’ouvrir un débat pour un véritable service public de la santé et les communistes ont des propositions : créer des Centres de santé municipaux avec des médecins salariés, construire des hôpitaux de proximité et soutenir l’hôpital public de manière générale, ouvrir davantage de places d’étudiants en médecine et bien sûr améliorer les conditions de travail et les salaires des soignantes et soignants !
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