Éducation nationale - Troyes
Les gouvernements sous Macron n'ont eu de cesse de dépecer méthodiquement l'enseignement public, en s'attaquant aux programmes du bac, à ses modalités, à l'inscription dans le supérieur, à l'enseignement professionnel, et au statut des professeurs du public. Le statut de REP et de REP+ n'y fait pas exception, à l’image du collège des Jacobins.
Le récent « pacte » proposé aux enseignants n'est ni plus ni moins qu'un « travailler plus pour gagner plus » ; pas besoin d'utiliser ce mot « pacte » : a-t-on besoin d'un « accord solennel » pour payer simplement une prime pour cause d’heures supplémentaires ? C'est vraiment prendre les enseignants pour des enfants et c'est dire en quelle estime E. Macron les tient. Enfin, les enseignants du public.
Ce dispositif du « travailler plus pour gagner plus » n'est aucunement une revalorisation mais un déni du travail au quotidien des personnels et, à terme, une attaque en règle contre les statuts. Dans le professionnel, par exemple, les missions envisagées sont directement liées à la mise en oeuvre de la réforme, faisant des enseignants les acteurs de la destruction de la voie professionnelle scolaire.
Face à la scolarité obligatoire, la France est loin d’investir dans l’école primaire et le collège autant que ses voisins européens.
La Depp (Direction de l'Evaluation, de la Prospective et de la Performance) qui appartient au service statistique public a rendu un rapport dans lequel on constate que les enseignants français enseignent plus longtemps que la moyenne de leurs collègues européens et sont moins bien payés que la moyenne de leurs collègues européens. Et c’est en France qu’il y a le plus d’élèves par classe à l’école élémentaire et au collège ! En France aussi que l'investissement public pour le primaire et le collège est plus faible que la moyenne européenne, avec une dépense annuelle par élève plus faible que la moyenne européenne.
Et l'évolution récente de la dépense d'éducation est plus faible en France que la moyenne européenne. En résumé la France paye moins ses enseignants en leur demandant de travailler davantage, avec plus d’élèves et moins de moyens…
Le collège des Jacobins illustre ce désinvestissement libéral de l'éducation, même et surtout prioritaire.
En 2013 et 2014, le taux de boursiers était plus élevé aux Jacobins que dans les deux collèges de La Chapelle-Saint-Luc classés REP+, et pourtant, le collège des Jacobins fut classé seulement en REP. Or les élèves viennent pour la plus grande partie des Sénardes et de Jules-Guesde, soit de quartiers figurant parmi les plus défavorisés socialement de l'Aube et même de France.
L'injustice est évidente, car le classement en REP + permettrait aux enseignants de disposer de moyens et de temps supplémentaires : par exemple, de bénéficier de la libération de plusieurs demi- journées par année scolaire pour recevoir les parents et travailler en équipe afin de définir et de prendre en charge les besoins spécifiques des élèves, car l'objectif est de corriger l’impact des inégalités sociales et économiques sur la réussite scolaire.
La grève annoncée par les enseignants du collège des Jacobins dès la rentrée répond donc à un sentiment d'exaspération légitime face à l'injustice faite aux élèves et aux personnels, et à l'indifférence du ministère de tutelle quand la crise économique touche encore plus fort les populations défavorisées.
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