Rillette, la laie recueillie bébé par une éleveuse de chevaux de Chaource, ne sera pas euthanasiée (euphémisme pour abattue). L’affaire a fait le tour du monde. Au Japon, en Amérique du Nord, au Brésil et dans toute l’Europe, Rillette a ému. On en a, m’a-t-on dit, aussi ri lors des bombances récentes entre la dinde forcie aux hormones et le foie gras. Avez-vous assisté au gavage des oies ? Moi oui, une fois par mégarde, j’ai vomi. Longue vie donc à Rillette et un grand coup de chapeau à l'opiniâtreté de cette Chaourçoise qui a fait tout un fromage pour sauver l’animal. Mais ce « fait divers » est lourd de sens. Il démontre comment la mobilisation citoyenne peut soulever des montagnes.
En 2022, des milliers d’Anglais ont bloqué les prélèvements de leurs factures d’énergie après une hausse de 174% en douze mois. L’État a dû intervenir auprès des énergéticiens (sociétés privées depuis Thatcher) pour faire baisser la tension. La « désobéissance civile » est un moyen connu depuis l’Antiquité (grecque notamment). Antigone brave ainsi les lois de la cité pour donner une sépulture décente à son frère. Martin Luther King, Rosa Parks, Mandela, Gandhi l’ont utilisée comme levier pour appuyer leurs luttes. Le sociologue Pierre Bourdieu, l’historien Américain Howard Zinn… la proposent comme action pour comprendre et agir sur le monde. « La désobéissance civile n'est pas un problème. Notre problème, c'est l'obéissance civile ! », disait ce dernier. À plus forte raison dans un ordre social où ceux qui tiennent les rênes de la société sont aujourd'hui capables, via de puissantes machines médiatiques et culturelles, de façonner nos idées, voire nous imposer les leurs. Pour paraphraser Marx, « citoyens de tous les pays, désobéissez ! ».
© 2025 - La Dépêche de l’Aube
Création : Agence MNKY