On les a un peu oubliées. Elles sont si loin et, comme dit l'adage : « loin des yeux [médiatiques – ndlr], loin du coeur ». On les a un peu oubliées les femmes afghanes. Et pourtant, comme l'alertait l'ONU fin 2023, leur situation « continue de se détériorer ». 21 ans mais hors d’âge : elle est déjà mère de six bambins, dont le dernier tète un sein vide. Elle a le regard creux, fait la manche dans la rue, entre les voitures, avec les aînés. Tombe à terre comme un sac et rejoint des fantômes affamés sous leurs tchadris, abandonnés à même les trottoirs. Ce qui se passe en Afghanistan est terrifiant. Naître femme en Afghanistan est une malédiction : du premier jour (à la maternité où les bébés garçons sont "raptés" par les belles-mères et les bébés filles malmenés), jusqu’au dernier. Les femmes sont bannies des cimetières, même quand il s’agit d’y enterrer leurs adolescentes mortes d’avoir voulu étudier. Entre les deux ? Il y a la séquestration, la peur, et la « débrouille », puisque tout ou presque leur est désormais interdit.
La résistance, envers et contre tout. D'une kiné harcelée par un collègue, d'une cheffe d’entreprise qui fabrique des serviettes hygiéniques, d'une paysanne battue qui réclame justice aux talibans, ou de cette militante aux cheveux blancs, Mahbouba Seraj, qui n’en peut plus de crier au monde que les femmes se meurent là-bas, dans une gigantesque entreprise d’effacement. Qu’est-ce qu’on fait ? Que font les instances internationales ? Que fait l’Union européenne ? Que fait la France ? Des condamnations aussi récurrentes qu’ inefficaces. « Un pays comme le nôtre ne peut pas rester insensible à leur situation », disait en septembre dernier Najat Vallaud-Belkacem, alors que la France accueillait… cinq réfugiées afghanes. Depuis ? Rien. « Ne me tue pas, ne me pleure pas, c’est ce que le monde fait pour nous », dit un proverbe local. Si loin… Et nos soeurs pourtant.
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