Il est curieux qu’à quelques encablures des élections européennes, le retour en force du « corset budgétaire » sur les États s’opère dans un grand mutisme médiatique. Un « nouveau cadre de la gouvernance économique », directive très opaque, pour donner les pleins pouvoirs à la Commission européenne de contraindre les États à mener une politique budgétaire « d’ordre ». Élégant euphémisme. Alors que les traités de Maastricht et de Lisbonne ont fixé le seuil du déficit budgétaire à 3% du PIB, ce nouveau texte oblige à descendre à 1,5%. La Commission européenne s’octroie le droit de fixer les programmes budgétaires pour chaque pays dont l’endettement dépasse 90% des richesses produites en les contraignant à réduire leur niveau d’endettement d’un point chaque année durant au moins quatre ans, « trajectoire soutenable » qui peut être prolongée jusqu’à sept années si les États consentent à de « nouvelles réformes structurelles ».
Mais il y a un gros brigandage. Le service de la dette, donc le niveau des taux d’intérêt et ce qui est baptisé « les effets fiscaux », seront exclus du calcul de la dépense publique. Autrement dit, les cadeaux fiscaux au capital et les intérêts de la dette dont se repaissent les hyènes des marchés financiers passent sous les radars. En revanche, le choc sera frontal pour les familles populaires qui souffrent déjà de la stagnation des rémunérations et des hausses de prix. La France se verra ainsi imposer 26 milliards de réductions budgétaires par an. C’est avec ce chiffre en tête qu’il faut comprendre l’annonce de Bruno Le Maire sur la nécessité de trouver immédiatement 12 milliards d’euros d’économies. On comprend mieux aussi, l’embrouille d'Emmanuel Macron sur la hausse du prix de l’électricité, le doublement du reste à charge sur les médicaments… entre autres. C’est aussi à cette aune qu’il faut mesurer les contre-réformes de l’assurance chômage, la réduction de la protection des seniors au chômage… entre autres.
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