L’habit ne fait pas le moine. Un uniforme peut-il refaire l’école et recoudre les loques de la République ? L’expérimentation voulue par le gouvernement débutera à la rentrée 2024. Pour apaiser les maux de la société et leur irruption dans les salles de classe, le « nivellement », l'« uniformisation » par le vêtement semblent en effet autant surannés que placébos. Car s’il s’agit de masquer les signes extérieurs de richesse sous un polo, il faudra alors aussi vider les poches des élèves, confiner les smartphones dernier cri et ôter les baskets hors de prix. Si on entend là réaffirmer solennellement la laïcité, que les enseignants défendent bien seuls sur la ligne de front et en vigie menacée, jusqu’à en perdre la vie, il sera nécessaire alors de tout niveler, avoir l'oeil sur toute signalétique émergente que les "inventifs" à tout crin ne manqueront pas d’imaginer. À l’âge de l’adolescence, de l’affirmation de soi et des identités, dans ce creuset imparfait où l’on apprend la différence, faudrait-il donc tout gommer ? Les enquêtes sur le niveau scolaire en France révèlent l’étendue des disparités d’apprentissage qu’un pull uni ne pourra jamais résorber.
Tout cela tient d'une médecine primaire qui calme les effets sans guérir les causes. Depuis les émeutes de l'été dernier, après les attentats islamistes d’Arras et de Paris… enfle de manière exponentielle l’idée d’un délitement de l’autorité publique. Or le gouvernement a choisi de parer au plus pressé et, englué dans le serpentin tue-mouches de l’extrême droite, d’allumer de chétifs contre-feux. Ici un uniforme, là des travaux d’intérêt général pour les parents défaillants, etc. S'il faut restaurer un sentiment d’appartenance à la République et endiguer la diffusion des venins identitaires, la réponse aux fractures françaises paraît bien maigre. Pour trouver les bonnes réponses, encore faut-il poser les bonnes questions. Là est le problème.
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