C’est un tour de magie réalisé avec de grosses ficelles. Anticor, qui joue depuis des années les empêcheurs d’enterrer les dossiers en rond, a perdu son agrément, le sésame qui lui permettait de mettre son nez dans des affaires un peu « sensibles ». Hop, en un tournemain, l'association de lutte contre la corruption a vu sa capacité d’agir - de nuire ? - réduite à néant. Entre Noël et Saint-Sylvestre, c’est le coup de Jarnac parfait. L'association a souvent appuyé là où ça fait mal. Mais ce sont des chicayas internes, que le gouvernement a regardées avec gourmandise, qui ont conduit au premier coup de trique en 2019.
Quatre ans plus tard, le coup de massue. C’est une excellente nouvelle - Noël toute l'année - pour les corrupteurs, les corrompus, les cachottiers, les « oublieux » et les magouilleurs de tout poil. L’association qui avait le droit - accordé par le gouvernement - de se porter partie civile dans toutes ces affaires, n’est désormais plus en état de le faire. Macron n'aime pas Anticor, il l'a dit et redit. Dans la nébuleuse qui gravite autour du détenteur du pouvoir et qui, en 2017, promettait comme premier engagement « une moralisation de la vie publique », annonçait une « exigence de transparence » pour « la dignité de la vie publique », les cabinets exhalent de fâcheux remugles. Preuve que l'argent a une odeur et que mal acquis, il profite parfois. C'était un caillou dans la chaussure du pouvoir dans un pays dont l’exemplarité n’est pas flagrante malgré les annonces et les mains sur le coeur. Il est d’ailleurs singulier que l’agrément, ce genre de « déclaration d’utilité publique », soit dispensé par le gouvernement.
C’est au minimum incongru à l’heure où les doutes sur l’éthique et la moralité en politique n’ont jamais été aussi forts. Contre- pouvoir, Anticor est renvoyée à la niche. Même pas fiscale.
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