Matthieu Pigasse a sorti un livre : « La lumière du chaos ». Cet ancien directeur général délégué de la banque d'affaires Lazard Frères, est un homme du sérail, très en vue dans les milieux économiques libéraux. Et pourtant, les propos qu’il tient dans son livre ont de quoi surprendre les militant.e.s que nous sommes. Accrochez-vous. Il écrit que, depuis le milieu des années 70, le rythme de croissance des salaires est inférieur à 0,5% par an en moyenne. À cette époque, il fallait 20 ans pour doubler son salaire. Aujourd’hui, il faudrait 140 années, grosso modo trois carrières professionnelles pleines. Au sein des pays de l’OCDE, la part de la rémunération du travail dans le revenu national total est passée de 66,1% au début des années 90 à 61,7% à la fin des années 2000.
Matthieu Pigasse pointe aussi l’explosion des inégalités, les 0,1% les plus riches détiennent 80 000 milliards d’euros en capital financier et immobilier. Il nous avertit que la « paix capitaliste » n’est pas un état naturel du système, et que la « main invisible du marché » d’Adam Smith n’existe pas. Pigasse déplore aussi le recul et l’affaiblissement de l’État et la "concurrence" que les grands groupes multinationaux représentent pour ces mêmes États… Le constat par un tel homme est sidérant. Et de sa conclusion, les bras m'en sont tombés. L’avenir, dit-il, c’est une société du partage, le développement de l’éducation et de la culture, deux piliers fondamentaux qui mettent en capacité de changer la vie. Enfin, poursuit-il, la lutte contre les inégalités est la mère de toutes les batailles. Qu'en penser ?
M'est revenue à l'esprit la réplique de Jean Gabin à un patron député qui se disait de gauche : « il y a aussi des poissons volants, mais qui ne constituent pas la majorité du genre »*.
* Dans le film Le Président (1961).
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