La question de l’élargissement de l’Union européenne sera l’un des principaux enjeux des prochaines élections européennes. L’un des pays concernés est la Moldavie, reconnue candidate en juin 2022.
La Moldavie est sans doute l’un des pays où le poids de l’oligarchie dans la vie politique est le plus fort. En 2014, les trois principaux oligarques, Vlad Filat, Vladimir Plahotniuc et Ilan Șor (qui a créé un parti à son nom, ultraconservateur et poutinien, désormais interdit), ont été accusés du « casse du siècle ». À eux trois, ils ont dérobé l’équivalent de 12 % du PIB du pays. Les deux derniers ont été contraints à l’exil.
Ce pays repose sur des équilibres fragiles, que l’adhésion à l’UE remettrait en cause. La rupture des équilibres serait un risque majeur pour son avenir. La population moldave est l’une des plus pauvres d’Europe, marquée par un taux d’activité de 41 % seulement et un salaire moyen de 550 dollars, qui a enregistré une baisse de 10 % en valeur réelle du fait de l’inflation. Elle connaît d’ores et déjà une très forte émigration pour le travail. L’adhésion à l’UE libérale ne serait pas une protection pour la population et renforcerait les rapports de dépendance.
On voit ainsi qu’une majorité de la population est attachée à la préservation de ces équilibres, garants de l’unité et de l’indépendance du pays. Par ailleurs, la politique libérale menée par le gouvernement actuel s’attaque également aux fragiles équilibres territoriaux.
Enfin, bien évidemment, la guerre en Ukraine et l’exacerbation des rivalités régionales entre la Russie et l’OTAN ont de très fortes conséquences sur la vie du pays. L’adhésion de la Moldavie à l’Union européenne serait accompagnée d’un resserrement des liens avec l’OTAN, ce qui serait grave pour la sécurité collective dans la région. D’ailleurs, une majorité de la population moldave y est opposée.
L’adhésion de la Moldavie à l’UE serait donc dangereuse pour l’avenir du pays. Son indépendance et son existence même reposent sur des équilibres fragiles dont la remise en cause aurait des conséquences graves pour la région et la population moldave. Cela signifierait que la Moldavie serait à la fois une petite périphérie de l’UE sur le plan des rapports de domination capitaliste, et une pointe avancée de l’euroatlantisme sur le plan des rapports de domination impérialiste. Cela la mettrait donc dans une situation extrêmement inquiétante. Les conséquences en seraient imprévisibles.
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