J’aurais tant voulu parler d’amour. Mais l’amour, c’est fini, c’est out, c’est has been, c’est ringard, c’est caduc, c'est pas cool, c'est pas dans la vibe. Deux êtres qui se rencontrent et qui s’effleurent, deux âmes qui fusionnent, c’est archidémodé. C’est bon pour les boomers. Voici le temps des robots, des machines, des gadgets bizarres, bref, de l’amour augmenté. Chèrement augmenté. R2D2, veuxtu m’épouser ? En 2018, un Japonais a convolé avec une créature virtuelle, donc inexistante, Hatsune Miko, nom d'une idole numérique sur écran glacé, créée en 2007 par la société Krypton, à qui un synthétiseur vocal faisait chanter des airs pop. Un humain, le con volé, a épousé un logiciel. Un grand pas pour l’humanité. On nous promet aussi d’intenses rencontres dans des mondes virtuels, à condition de se caparaçonner d’un équipement de style orthopédique. Monsieur de La Mettrie*, nous voilà !
Pour l'essayiste Vincent Cocquebert : « […] deux tiers des Français estiment que l’on ne se méfie jamais assez d’autrui ». « L’enfer, c’est les autres », disait déjà Sartre en 1943 dans sa pièce HuisClos. Alors, on trie l’autre sur des applis qui le résument à une mitraille de clichés (dans tous les sens du terme), ou on plonge dans la romance dans les galeries marchandes du « distanciel ».
Notre camarade René Granmont a récemment donné une excellente conférence pour l'Upop sur l'intelligence artificielle. Moi, je dis « artificieuse » tant l'« IA » est une arnaque qui veut faire prendre des vessies fallacieuses pour des lanternes magiques. « L'amour est enfant de Bohème. Il n'a jamais, jamais, connu de loi » chante la Carmen de Bizet. Perdu ! Il en a toujours eu une : l'argent. J'aurais tant voulu…
* Julien Onfray de La Mettrie publie en 1747 un ouvrage « L'homme‐machine » où, après Descartes pour l'animal, l'homme est assimilé à une série organisée de mécanismes.
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