On les voudrait passeurs de savoirs. On en fait petit à petit, à travers les drames dont est victime l’École, et bien malgré eux, des gardiens qu’on voudrait garants de la paix dans les établissements. Ce n’est pas leur rôle. Ce n'est pas pas leur vocation. On aimerait voir les enseignants, pas comme « les copains », mais d'abord comme ceux qui, en toute liberté et sans crainte, transmettent les briques de connaissances, les plans et les outils pour bâtir un meilleur avenir. On sait, pour l'avoir pratiqué, le petit jeu du chat et de la souris, entre élèves qui préféreraient vaquer à leurs loisirs – ailleurs que dans une salle de classe – et profs et instits qui, entre pédagogie et autorité pondérée, s'efforcent de forger les citoyens de demain. On ne peut en revanche accepter que ce qui devrait être un sanctuaire devienne un lieu de peur, un endroit où l’on demanderait, par l'irruption des violences de l’extérieur, aux enseignants d’endosser l’uniforme de policiers. De s'armer peut-être, comme aux États-Unis ?
L'assassinat de Dominique Bernard, trois ans après celui de Samuel Paty, nous plonge dans l’horreur tout autant que dans la colère. L’enquête dira si de graves manquements ont conduit au drame. L’émotion est grande au sein du corps enseignant, mais aussi chez les élèves et dans le pays. Mais il y a un temps pour tout. Pour de nécessaires minutes de silence, des hommages solennels ou des panégyriques sur un métier essentiel. Et pour tout le reste. Un discours commence néanmoins à se faire entendre : assez de belles paroles, des actes ! En matière de sécurité, on n’atteindra jamais le risque zéro. Mais certains ont le sentiment, trois ans après la mort de Samuel Paty, que d’une certaine manière et de manière certaine, on les a abandonnés à leur mauvais sort.
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