Démocratie
Alors que des états généraux de l’information sont lancés en septembre, les milliardaires continuent d’étendre leur contrôle des médias. Comme Vincent Bolloré sur le JDD et Rodolphe Saadé sur la Tribune.
Face à la jonction dans les médias de l’extrême droite et de certaines puissances financières, l’urgence est à une loi anti-concentration. La liberté de la presse ne peut pas se contenter d’une pétition de principe. En 1904, dans son premier éditorial de l’Humanité, refusant la perspective que des difficultés financières livrent le journal à « des influences occultes », Jean Jaurès écrivait : « Faire vivre un grand journal sans qu’il soit à la merci d’aucun groupe d’affaires est un problème difficile mais non pas insoluble. »
En 1936, Paul Vaillant-Couturier, qui bataillait notamment pour la publication des ressources des journaux, rappelait que « les trusts de presse au service des oligarchies sont la négation même de la liberté de la presse ». En 2023, l’indépendance de la presse et des médias à l’égard des puissances d’argent est plus que jamais une conquête permanente. Pour une large part, un tout petit nombre de grands propriétaires possèdent, en plus de tout le reste, des médias qui leur servent à modeler l’opinion et à protéger leurs intérêts.
La démocratie a besoin d’une information de qualité.
Ce sont eux qui se portent au chevet des journaux et leur engagement a toujours un prix. Avec la révolution numérique, ces enjeux ont pris une nouvelle dimension. Il y a besoin de fonds considérables pour pouvoir développer un média, pour payer le travail d’hommes et de femmes dont l’information est le métier, à l’heure où certains prétendent s’en passer. Or la démocratie a besoin d’une information de qualité.
Elle a besoin de liberté de la presse et de pluralisme pour animer un débat public sincère et fructueux. C’est indispensable pour permettre à chacune et à chacun d’appréhender le monde, de comprendre les enjeux qui traversent la société, de se forger une conscience et d’agir.
À notre époque, la jonction sans vergogne de certaines puissances financières avec l’extrême droite est en train de provoquer dans le paysage médiatique des dégâts extrêmement préoccupants pour l’avenir. La République ne doit sous-estimer ni le signal envoyé par des puissances d’argent considérables, ni les effets de la banalisation des discours antirépublicains dans les médias dominants.
Une loi anti-concentration doit rapidement être mise à l’ordre du jour pour empêcher la constitution d’empires, pour réaffirmer le caractère d’intérêt général de la mission d’information, pour renforcer les protections des journalistes et imaginer un statut particulier pour les entreprises de presse.
Il y a urgence à forger des outils de lutte contre la dénaturation inamicale des titres de presse ou encore à revoir les aides à la presse pour garantir des financements viables et débarrasser les rédactions de l’impératif de rentabilité incompatible avec la production d’une information de qualité.
Il faut également garantir la diffusion de la presse écrite sur l’ensemble du territoire et inventer pour l’ensemble de la presse un rapport équilibré avec les puissances numériques.
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