Le 28 mars, des perquisitions ont eu lieu dans cinq banques à Paris. BNP Paribas, la Société générale, HSBC, Natixis et Exane (filiale de BNP). L’affaire remonte à 2018. Le Monde avait révélé, dans une enquête intitulée « CumEx Files », les pratiques de certaines banques « facilitatrices » de fraude fiscale. « Sujet d’arbitrage de dividendes », disent les banquiers qui manient autant chiffres que jargonnage : leur « sociolecte »* diraient les linguistes. Mais késako ? Des actionnaires étrangers transféraient la propriété de leurs actions à ces banques la veille du versement des dividendes, ce qui leur permet d’échapper aux impôts sur les dividendes. Un pillage fiscal de 140 milliards d’euros au niveau européen. Pour la France, les pertes seraient entre un et trois milliards d’euros par an. Et dire qu'il n'y aurait plus de sous pour les retraites ! En 2018, la Commission des finances du Sénat avait produit un amendement visant à empêcher ces pratiques, que la majorité macronique à l’Assemblée Nationale a illico expurgé, le rendant complètement insipide. Ne touchez pas au grisbi !
Les Allemands ont été bien plus énergiques. Deux présidents de banques impliquées ont été destitués, jugés et condamnés. On ne rate jamais une (mauvaise) occasion de nous mettre sous le nez le modèle allemand. Pas là ? Bizarre. On ne peut qu'espérer que ces perquisitions permettent à la Justice d’aller sans entraves jusqu’au bout… du filon. Mais il faut savoir que quatre des banques perquisitionnées font partie de la quinzaine de banques habilitées par Bercy à acheter nos titres de dette publique, les « SVT », les spécialistes en valeur du Trésor dans le "sociolecte" des financiers.
On confie donc à ces banques peu scrupuleuses le soin de gérer notre dette… qu’elles contribuent elles-mêmes à creuser en escamotant des recettes fiscales. Énorme paradoxe.
* Sociolecte : usage langagier d'un groupe social.
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