Au feu ! Au feu ! Les « Pétroleuses » de la Commune de 1871 sont de retour. On n'y voit que du feu aux actus, hachées d'éphémères impromptus vidéos de manifestants pacifiques, comme si l'on se souvenait en pointillé qu'il n'y a pas que dégradations et saccages dans les cortèges. Mais les « Pétroleuses », accusées d'allumer des incendies, harpies en guenilles comme elles furent caricaturées par la presse sous la baguette de Thiers, sont un mythe.
Les recherches dans les archives lui ont tordu le cou. C'était une campagne de propagande orchestrée par les Versaillais. Zola avait déjà rectifié le tir : « […] ces pétroleuses dont la peur hantait les imaginations hallucinées, qu'on accusait de rôder le soir, de se glisser le long des habitations riches, pour lancer des bidons de pétrole enflammé dans les caves* ». Les mythes ont la vie dure. Les réseaux sociaux se sont enflammés et vitupèrent ; imaginations hallucinées. Au feu ! Au feu ! La maison brûle et l'on ne regarde que cela. Dans le grésillement médiatique, à peine discerne-t-on, la petite musique d'Olivier Véran annonçant d'autres réformes à venir : « impopulaires » mais « nécessaires ».
L'Espagne, aussi, a une pétroleuse : la ministre des Finances. María Jesús Montero a allumé les superprofits des groupes financiers et de l'énergie. Une taxe devrait rapporter 6 milliards d'euros en deux ans, redistribués pour « la santé publique, l'éducation ou la dépendance ». Taquine, elle a renvoyé dans les cordes les banquiers ibères, chafouins et grognons, leur rappelant que le gouvernement avait sauvé de nombreuses banques lors de la crise financière de 2008.
« Il faut que la France choisisse entre une révolution sociale et une révolution fiscale ». Sidérante prémonition de 1852 du très libéral - et rallié aux Versaillais ! - Émile de Girardin, au moment où la République se consume par l'autoritarisme et l'arbitraire d'une camarilla de pyromanes au pouvoir. Au feu ! Au feu !
* La Débâcle - 1892
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