Quand elle nous parle, la terre, par milliers on enterre. Le séisme qui a frappé la Turquie et la Syrie est une catastrophe naturelle. L'expression fait grésiller nos cortex et émerger l' "évidente" fatalité. On n'y peut rien, c'est comme ça. C'est glisser sous le tapis d'une réalité géologique scientifiquement bien étalonnée, la tectonique des plaques, les gravats de la responsabilité humaine. Alors, on obscurcit davantage l'embarrassante part d'ombre en mettant à l'envi sur le devant des écrans des images déchirantes et poignantes,
Quand elle nous parle, la terre, elle donne, par l'holocauste, le prix de la sottise et de la nuisance humaine. Les Crétois, trois mille avant notre ère, au grand étonnement des archéologues, savaient bâtir des édifices antisismiques ! Les régions les plus exposées sont aujourd'hui précisément cartographiées. Mais casse là qui ne tienne !
Quand elle nous parle, la terre, elle plaide non coupable. Du petit maçon peu sourcilleux, sinon de gratter trois francs six sous, aux géants de la construction, c'est la même logique qui prévaut. La qualité de l'ouvrage est à la rente financière ce que la termite est aux poutres et aux solives. Avec le même résultat. Logique mortifère, logique criminelle : logique du capital.
Quand elle nous parle, la terre, elle pousse un cri d'alarme. Elle dit aussi que c'est encore elle qui tient les rênes, qu'à trop la chauffer, la mutiler et l'épuiser avec un système inique, un jour, c'est son propre écho qu'elle entendra.
© 2025 - La Dépêche de l’Aube
Création : Agence MNKY