Il faut qu’on m’explique. Voilà belle lurette qu’on sonne le tocsin contre les cheminots, ces privilégiés qui flemmardent sous la couverture de leur statut usuraire pour le denier public. Voilà quarante ans qu’on charcute les effectifs, réduits de 232 000 à 134 000.
En septembre dernier encore, le président de la SNCF déclarait : « supprimer 2 000 ou 3 000 postes [en 2022], ce n’est pas un drame ». Il faut qu’on m’explique pourquoi l’entreprise ferroviaire se dit aujourd’hui en manque de 10% d’effectifs pour assurer toutes ses liaisons sur l’ensemble du territoire, dont 1 200 conducteurs, privilégiés d’entre les privilégiés pointés d’un doigt accusateur.
98 000 emplois en moins : « pas un drame » ! La ligne 4 Paris-Troyes en est chez nous l’illustration. Et c’est chaque jour en moyenne 3,7 millions d’usagers qui pâtissent, sous diverses formes, de la dévalorisation quantitative et qualitative du service ferroviaire public. La main sur le coeur - et jamais loin du portefeuille -, la direction dit vouloir embaucher… mais rencontrer des « difficultés de recrutement ».
À Romilly, le maire a longtemps eu comme leitmotiv au Conseil Municipal qu’il y avait une foultitude d’emplois de chauffeurs poids lourds à pourvoir avec, là aussi, des « difficultés de recrutement ». Mon petit doigt, qui a des accointances au sein d’un service de l’emploi, m’a soufflé une conjecture : emplois payés avec des queues de cerises. À défaut de grives… on s’essaya à appâter des retraités de la profession. On fit maigre.
Des décennies de casse et de dégradations des conditions de travail expliquent presque tout. Comment seront obtenus les trois milliards de bénéfices annoncés pour 2022 par la SNCF ? Pas de quoi en faire un drame.
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