En prétendant répondre lui-même « directement » aux Français par le biais des réseaux sociaux, Emmanuel Macron se pose en champion de la lutte contre le Covid-19, face à une population supposée réticente à la vaccination.
Il s’agit en fait d’une diversion, destinée à lui permettre de faire campagne en vue de sa réélection. Toutes les enquêtes montrent que la grande majorité des Français est bien disposée à l’idée de se faire vacciner. Le ressort principal du mouvement qui se développe depuis plusieurs semaines est autre : il se cristallise sur le passe sanitaire et la logique de citoyenneté à deux vitesses qu’il instaure.
En d’autres termes, c’est le président de la République qui, par sa gestion de la crise, porte la responsabilité d’avoir introduit un sujet de division potentielle des Français, sur lequel une mouvance « antivax » très minoritaire se greffe pour donner de l’écho à sa campagne de désinformation. Face à cette entreprise, tout appelle à la discussion large et pluraliste des arguments pour dissiper les fausses nouvelles.
Au lieu de cela, l’autoritarisme qui se cache derrière la prétendue omniscience présidentielle est le carburant idéal du complotisme et de la confusion des idées. Le discrédit du chef de l’État auprès des « antivax » est tel que, même s’il énonce des évidences, celles-ci seront immédiatement réinterprétées comme la preuve de la manipulation qu’ils dénoncent.
Dans ces conditions, la parole d’ E. Macron ne convaincra que ceux qui ne demandaient qu’à l’être. Mais elle risque, à l’inverse, de renforcer cette frange irrémédiablement hostile au vaccin, au détriment de l’opposition démocratique et progressiste au passe sanitaire.
En libéral bon teint, E. Macron, qui rêve d’une obligation vaccinale sans l’assumer, préférera toujours renvoyer à la responsabilité individuelle ce qui relève de la gestion publique. Les entreprises et leurs salariés se retrouvent ainsi sommés d’assurer l’intendance d’une stratégie autoritaire prise dans l’urgence et le mépris de la représentation nationale. L’extension punitive du passe Covid va produire tensions et fractures et marginaliser les populations défavorisées. Cette impasse sanitaire n’effraie pas E. Macron. Il sait que l’affrontement caricatural entre vaccinés et anti-vaccins rend inconfortable toute critique de l’opposition. Et sert sa stratégie, tout autant politique que sanitaire. Un virus du cynisme qui n’a pas encore de vaccin.
Au final, c’est l’extrême droite qui pourrait en tirer profit, dans son duel ainsi remis en scène avec E. Macron. Si c’est un calcul de la part du locataire de l’Élysée, il est exécrable et irresponsable, à moins de neuf mois de la présidentielle.
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