Alain Fourtier ne cesse pas de surfiler le paysage musical troyen
de ses inventions jazzistiques. Il vient d’éditer son cinquième album avec un quartet joliment nommé
« Fleur d’ombre »*, un oxymore, car les fleurs n’aiment pas vivre la nuit,
sauf les fleurs des guitares et des trottoirs.
C’est Alain qui a composé tous les thèmes de l’album. J’admire d’ailleurs
son talent inventif car ces thèmes prêts à susciter les impros des uns
et des autres ne sont pas de simples standards, mais des mélodies
raffinées soutenues par une harmonie originale. Parmi ces 12 morceaux à quatre voix, brille particulièrement le sax de
Philippe Margery, dont j’apprécie le son et les pertinentes répliques.
Eric Varache, le batteur reste volontairement discret mais efficace tandis
qu’Eric Sindorf à la basse acoustique tient la boutique en brodant
dans l’ombre (nous y voilà) une trame au pouls hypnotique. Avec ces
deux rythmiques, y a de l’assise. Quel aplomb !
Il ne reste plus à Alain qu’à développer ses guirlandes fantaisistes. Ça tombe à pic, voilà Noël. On trouve du bebop frénétique et espiègle, de la délicate bossa, du cool comme en faisait Gerry Mulligan dans un style toujours bien installé, bien construit. Un quartet comme on les aime, qu’on glisse dans la fente de son autoradio et qu’on savoure pour étouffer les mauvaises nouvelles.