On peut nier la peur pour la vaincre : attitude consciente qui est
un défi adressé aux violents et qui donne un sens à la mort inattendue.
Mais les foules ont des réflexes surprenants.
Samedi 19 aout : le roi et la reine se recueillent devant un parterre
de fleurs en hommage aux victimes. Les photos de presse
montrent la dignité des officiels. Une forêt de bras brandissant
des portables est dirigée vers les souverains. La foule tourne le
dos à l’endroit sacré du massacre, absorbée par la vision à enregistrer.
Les mêmes scènes se répètent au cours de la grande
manifestation du 26 aout. Certes, on s’habitue à l’horreur. Ce qui
faisait pendant des jours les gros titres des infos est maintenant
rejeté dans les faits divers. Les assassins sont victimes de leurs
succès et Facebook a repris sa place primordiale dans le comportement
des foules. On communique avec excès et banalité.
Ce qui n’empêche pas de manifester et de conspuer le roi et
les responsables qui font du fric avec le commerce des armes.
Le refus de la peur est aussi refus des guerres et de la misère
avec leur cortège de vengeances terroristes. Mais dans le
même cortège s’affichent aussi des replis nationalistes qui dévoient
les colères. En Espagne et ailleurs, nous vivons une
époque de tous les possibles.