Ils viennent enfin de le mettre dans le dictionnaire Larousse.
Qu’avait-il donc fait ?
La Sécu, ma vieille, les allocs, la retraite et les comités
d’entreprise !
Rien que ça ! Ils auraient pu le mettre plus tôt dans le dico,
ton Ambroise Croizat. Il vient de mourir peut-être ?
Pas du tout, il est mort en 1951. Un million de personnes
suivirent son cercueil et le président Herriot prononça un
éloge appuyé.
On ne peut pas mettre tout le monde dans le dictionnaire,
quand même !
Sans doute, mais quand il y a de la place pour Johnny Hallyday
ou Rika Zaraï, on pourrait en trouver une pour Croisat [1] non ?
Marcel Paul, qui créa et nationalisa EDF-GDF, n’y est pas encore.
Ni Rol-Tanguy qui mit von Choltitz à genoux. Il est vrai
qu’avec Croizat, ils étaient communistes et cégétistes.
Qu’on
le croie ou non, c’est un sacré frein pour entrer dans un dictionnaire.
Interrogé par le journal Fakir sur ceux qui ont en
mains la presse et l’édition et manipulent l’histoire, Alain Rey,
rédacteur du dictionnaire Robert, s’interrogeait sincèrement :
« De façon inconsciente, le Robert construit-il une mémoire
bourgeoise ? » Sa réponse n’était nullement négative.
Cette mémoire populaire, ouvrière est à construire chaque
jour. C’est le rôle des élus et des associations. Jean Ferrat qui
vient de mourir, Louis Aragon dont on fêtera le 30è anniversaire
de la mort l’an prochain, Marguerite Buffard-Flavien,
doivent être mis à l’honneur dans les rues, les places et les
dictionnaires. C’est un devoir de mémoire, comme on dit. De
plus, comme le gouvernement actuel est en train de détricoter
tous les acquis sociaux de la Libération, l’oeuvre immense
de ces pionniers, le devoir de mémoire doit se doubler d’un
devoir de vigilance, ce qui signifie combat dans ce cas-là.